Dimanche 29 juillet 2007 à 21:38

Me jeter dans l'eau, aller jusqu'au fond sur le dos, sentir l'eau qui me recouvre. Le silence. Ne plus vouloir remonter, battre des pieds et des mains pour rester au fond, abandonner. Ouvrir les yeux. La surface de l'eau vue d'en bas, un dégradé du bleu du ciel au vert des arbres, puis des bords ronds bordés d'orangé, effet du soleil. Se sentir remonter, comme aspirée par le ciel, qui se rapproche de plus en plus vite. Le silence qui s'estompe, les arbres qui disparaissent, une fine pellicule d'eau qui me sépare de la réalité. Accepter la défaite. Voir le monde différement, respirer l'air qui m'entoure, sentir le vent sur mon visage. Et recommencer.







Jeudi 25 janvier 2007 à 22:36

   S'il pleuvait, il ferait un énorme orage. La pluie serait battante, toujours plus droite, plus épaisse, jusqu'à ne plus voir mes pieds. Des éclairs déchireraient le ciel au rythme des coups de tonnerre. D'immenses raies dans le ciel. La violence de l'eau qui entre en contact avec le sol pour bruit de fond. Des flaques assez profondes pour y perdre mon regard.
   Et les flaques gèleraient. Et les gouttes d'eau se transformeraient en flocon de neige. Et le vent soufflerait de plus en plus fort. Dans cet tempête interminable on ne verrait plus rien, aveuglés de ce blanc innocent et meurtrier. 
   Peu à peu, les nuages noirs d'où se seraient échappés toute cette colère et toutes ces larmes laisseraient la place à des nuages un peu plus gris. Puis un peu plus blancs.
   Parce que le blanc n'est qu'une association de couleurs. Et les couleurs ne sont que de simples intermèdes entre noir et blanc.
   Parce que au sortir de cette tempête il ne restera rien de ce que je connaissais. Et que ce que je connaissais était le seul lien entre eux et moi.
   Parce que je ne verrai plus rien et que l'innocence hypocrite de la terre blessée qui restera ne sera que temporaire.
   Parce que j'aurais dû y résister parfaitement ou ne jamais sortir de ce déluge. Parce que tout sera dévasté en moi et que rien ne pourra être reconstruit. Parce que mon regard aurait dû me perdre toute entière dans ces flaques.

   Parce que l'arrêt de la tempête n'arrête rien d'autre que la pluie et que tout bat encore plus fort que le vent dans mes oreilles, tout ce qu'il me reste maintenant ce sont les flaques qui n'ont même pas été capables de me perdre et les nuages un peu plus gris puis un peu plus noirs où le combat continue.

Mardi 28 novembre 2006 à 18:38

Arriver. Dire bonjour. Faire la bise. Sourire. Toujours sourire. Aller en cours. Être attentive. Ne rien laisser paraître. Ne jamais rien laisser paraître. Ne pas parler. Ne rien dire. Sourire. Faire semblant d'écouter. Rire aux blagues pas drôles. Sourire. Faire semblant. Travailler. Essayer de travailler. Ecouter. Ecouter pour se perdre. Ecouter pour écouter. Ecouter pour oublier. Se perdre pour écouter. Sourire. Toujours sourire.

Don't just live, live larger.
[ Essaye, arrives-y, et après tu m'expliques ]

I only wanted the life I'd read about and dreamed

Vendredi 13 octobre 2006 à 23:23

Tu est tout ce qu'elle rêve d'être, même si tu ne t'en rends pas compte. Tu es ce qu'elle désire le plus au monde et qu'elle n'aura jamais. Tu as ce qu'elle veut et elle te déteste pour ça. Tu es son idéal, un objectif à atteindre qu'elle n'atteindra jamais. Elle le sait. Tu ne le sais pas, elle ne le montre pas. Tu es son exemple. Elle n'arrivera jamais à être ce que tu es, et elle se rendra compte qu'elle ne le désire pas tant que ça, au fond. Elle a besoin de toi, d'un modèle. Elle veut être toi, et n'y arrive pas. Elle te déteste et te méprise pour ça. Elle voudrait prendre ta place. Un jour, elle se rendra compte qu'elle ne peut pas, qu'elle ne veut pas. Elle se rendra compte qu'il est temps d'être Elle. Mais elle ne sait pas qui elle est. Un jour, elle se trouvera, saura qui elle est. Alors tu te reconnaitras en elle.
Ne lui dis pas que je t'ai dit ça, elle en changerait profondément...

Dimanche 24 septembre 2006 à 22:07

Ophélie


I

Sur l'onde calme et noire où dorment les étoiles,
La blanche Ophélia flotte comme un grand lys,
Flotte très lentement, couchée en ses longs voiles.
On entend dans les bois lointains des hallalis.

Voici plus de mille ans que la triste Ophélie
Passe, fantôme blanc, sur le long fleuve noir;
Voici plus de mille ans que sa douce folie
Murmure sa romance à la brise du soir.

Le vent baise ses seins et déploie en corolle
Ses grands voiles bercés mollement par les eaux.
Les saules frissonnants pleurent sur son épaule.
Sur son grand front rêveur s'inclinent les roseaux.

Les nénuphars froissés soupirent autour d'elle.
Elle éveille parfois, dans un aulne qui dort,
Quelque nid d'où s'échappe un petit frisson d'aile.
Un chant mystérieux tombe des astres d'or.


II

O pâle Ophélia, belle comme la neige,
Oui, tu mourus, enfant, par un fleuve emporté!
C'est que les vents tombant des grands monts de Norvège
T'avaient parlé tout bas de l'âpre liberté.

C'est qu'un souffle inconnu, fouettant ta chevelure,
A ton esprit rêveur portait d'étranges bruits;
Que ton coeur entendait la voix de la Nature
Dans les plaintes de l'arbre et les soupirs de nuits.

C'est que la voix des mers, comme un immense râle,
Brisait ton sein d'enfant trop humain et trop doux;
C'est qu'un matin d'avril un beau cavalier pâle,
Un pauvre fou, s'assit muet à tes genoux.

Ciel, Amour, Liberté: quel rêve, ô pauvre Folle!
Tu te fondais en lui comme une neige au feu.
Tes grandes visions étranglaient ta parole.
- Et l'Infini terrible effara ton oeil bleu.


III

Et le Poète dit qu'aux rayons des étoiles
Tu viens chercher, la nuit, les fleurs que tu cuillis,
Et qu'il a vu sur l'eau, couchée en ses longs voiles,
La blanche Ophélia flotter, comme un grand lys.

 

Arthur Rimbaud, PoésiesOphélia ]

 

 

 

<< Page précédente | 1 | 2 | 3 | 4 | 5 | Page suivante >>

Communiquer

    Créer un podcast